dimanche 6 décembre 2015

INFLATION ET TERRORISME



On parle souvent de « l’inflation législative ». Et tout le monde s’accorde pour reconnaître que ce phénomène d’inflation est un mal. Et un mal qui ne solutionne aucune situation, et qui peut  même l’accentuer.

L’inflation de textes est décrié.

L’inflation de services est également contraire à l’efficacité que chacun peut attendre de l’Etat.

Sur le plan des services de Police et de Renseignement

DGSI. BLAT. SDAO. SDAT. DRPP. EMOPT.

Les abréviations de ces services intervenant dans la lutte contre le terrorisme donne déjà le tournis. Pourtant, sont désignés 6 services.

En matière anti-terroriste, ce sont dix neuf services qui interviennent dont le dernier en date, le EMOPT placé sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur.

Inflation de services.

Qui dit multitude d’acteurs pose la question de la coordination des efforts déployés contre le fléau !

Si deux services distincts surveillent un même suspect, le moins que l’on puisse dire est que l’efficacité de l’action diminue.

Alors pourquoi ajouter un service à un autre service ?

Un rapport parlementaire en 2009 posait les carences de ces acteurs. En tire-t-on les conséquences ?

Que dire de la disparition des RG sur l’efficacité de la surveillance du territoire national ? A chaque fait divers, une loi !

A chaque attentat, un nouveau service anti-terroriste ?

Sur le plan législatif, faut-il encore et encore légiférer ?

La loi sur le terrorisme est en date du 13 novembre 2014 : la loi dite loi Cazeneuve.

Elle définit le terrorisme – article 421-1 du Code pénal - et crée le délit d’apologie du terrorisme – article 421-2-5 du même Code pénal -.

Faut-il plus de textes ?

La loi du 20 novembre 2015,  suite aux attentats du vendredi 13 novembre 2015, a trait à l’état d’urgence et aux mesures d’assignation à résidence, contrôle des armes etc...

Devant l’Assemblée Nationale, le Premier Ministre a demandé aux députés d’écarter tout juridisme.
Et la loi sur le renseignement.

Pour finir ce billet, lisons les propos de Robert BADINTER, ancien Garde des Sceaux et Sénateur :

« Ce n’est pas par des lois d’exception et des juridictions d’exception qu’on défend la liberté contre l’ennemi. »

Et pour finir, la conclusion de Robert BADINTER :

« Les terroristes nous tendent un piège politique » 

Comment y répondre ? Certainement pas par l’inflation des textes et des services. C’est le point de départ d’une réflexion difficile contre cet ennemi.


Emmanuel Gonzalez

mercredi 2 décembre 2015

Sur l'état d'urgence : de la loi de 1955 à la loi du 20 novembre 2015



C’est sous le gouvernement de Guy MOLLET, sous la IVème République, qu’apparaît la notion « d ‘état d’urgence ». C’est une loi n° 55-385 du 3 avril 1955 qui va définir « l’état d’urgence ». 

Ce texte naît pendant les événements d'ALGÉRIE. De la guerre d’ALGÉRIE. 

L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, des départements d’outre-mer, des collectivités d’outre mer. 

Sous quelle conditions ? 

- Soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public ;
Soit en cas d’événements présentant par leur nature et leur caractère de calamité publique

Suite aux attentats du vendredi 13 novembre dernier, c’est une loi en date du 20 novembre, loi 2015-1501, qui a été votée. Dans l’urgence, pourrait-on dire.

Comme vous l’avez déjà remarqué, mais ici, vous aurez la confirmation du texte, la nouvelle loi s’applique à une population bien plus grande que les personnes soupçonnées d’activités terroristes. 

L’article 6 de la loi nouvelle a trait à l’assignation à résidence. 

Cette mesure peut être mise en place à l’égard « de toute personne résidant dans une zone fixée par décret et à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et  à l’ordre public ». 

Il faut noter la notion de « comportement ». La notion "d'activité" aurait plus relevé de la sécurité juridique. 

Une notion extrêmement floue. D’autant plus floue que la loi du 20 novembre 2015 est une loi d’exception. 

Cette loi ne concerne pas que les terroristes et présumés terroristes. Elle concerne « toute personne résidant dans une zone fixée par décret et à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public ». 

Je ne parlerai pas des prérogatives du Ministre de l’Intérieur en matière d’associations. Je n’évoquerai pas la question du contrôle des armes. 

Je pose uniquement la question de la loi et de son application face aux libertés fondamentales. 

Devant le Juge des Référés du Tribunal Administratif de RENNES, il y a quelques jours, des militants du climat ont saisi la justice. Plusieurs étaient assignés à résidence. En audience non publique, tous les recours ont été rejetés. 

Je soumets la motivation de quelques unes de ces décisions à votre sagacité : 
Le juge souligne par exemple, en évoquant l'un des militants, qu’il existe des « raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la COP21 », « partie de la mouvance contestataire radicale ». Il a « été précédemment interpellé en Italie, en marge de l’exposition universelle de Milan » et « soupçonné d’avoir participé à des incidents ».  «Bien connu des services de police pour des faits de destruction ou de détérioration importante de biens publics et participation à un attroupement malgré les sommations de dispersion ».
Pour une autre jeune femme, le juge des référés se contente de rappeler sa participation aux manifestations contre Notre-Dame-des-Landes en février 2014 ainsi qu’à un rassemblement à Pont-de-Buis, dans le Finistère. 
Le Juge Administratif s’est contenté de reprendre l’argumentation du Ministre de l’Intérieur. 

Emmanuel GONZALEZ

lundi 6 juillet 2015

Cour d'Appel de Paris : condamnation "Aigle noir contre Rat noir"

« FAITS ET PRÉTENTIONS

A. dite Barbara est une auteure compositrice interprète française décédée le 24 novembre 1997. Elle est l'auteure notamment de la chanson "L'aigle noir"(paroles et musique).
Monsieur X est l'ayant droit de Monsieur Y, décédé le XXXXX, frère de la chanteuse, qui était son légataire universel et son exécuteur testamentaire.
M. X a découvert que Dieudonné M'BALA M'BALA proposait sur différents sites internet un clip vidéo constitué d'une chanson intitulée "le rat noir" composée de la musique de Barbara et de paroles modifiées et de ses commentaires incrustées sur cette chanson interprétée par une femme.
Il en a fait dresser constat le 14 avril 2014.
Il a fait assigner en référé d'heure à heure Dieudonné M'BALA M'BALA afin d'obtenir la cessation de l'atteinte au droit moral de A. dite Barbara et une indemnisation du préjudice subi.
Une ordonnance réputée contradictoire a été rendue le 10 juillet 2014 constatant que le clip vidéo dénommé le rat noir et la chanson le rat noir constituaient une atteinte au droit moral de M. X ayant droit de A. dite Barbara, interdisant à Dieudonné M'BALA M'BALA toute reproduction ou représentation des oeuvres contrefaisantes, ordonnant à Dieudonné M'BALA M'BALA de cesser toute diffusion du clip vidéo et de la chanson le rat noir sur tout site internet et ce sous astreinte 5.000 euros par jour de retard, allouant 10.000 euros à titre de réparation du préjudice, outre une somme 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Cette décision a été signifiée à M. Dieudonné M'BALA M'BALA le 15 juillet 2014.
M. X indique que Dieudonné M'BALA M'BALA en aurait fait appel mais ne l'aurait pas exécutée.
Il a fait dresser des procès-verbaux de constat les 22 juillet et 5 août 2014.
Par acte en date du 8 septembre 2014, M. X a fait assigner M. Dieudonné M'BALA M'BALA
(...) 
Sur l'atteinte au droit moral de l'auteur
Monsieur X fait valoir que le clip vidéo "le rat noir" de M. Dieudonné M'BALA M BALA et la chanson "le rat noir " constituent une atteinte au droit moral de l'auteur protégé par les articles L 121-1 et suivants du code de procédure civile en ce que la chanson "le rat noir" dénature la chanson "l'aigle noir" et qu'elle est de plus assortie des commentaires du défendeur qui ne peuvent être considérés comme une parodie notamment en raison de la violence des propos tenus qui établissent le caractère vexatoire du clip-vidéo et de la chanson prise isolément.
Il fait valoir que l'objectif de M. Dieudonné M'BALA M BALA est de choquer à travers la mise en relation d'une chanson mélancolique sur fond d'histoire tragique s'agissant des abus sexuels dont BARBARA a été victime.
Sur ce
L'article L 121-1 du code de propriété intellectuelle dispose que "L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre."
La chanson "l'aigle noir" est une chanson emblématique de BARBARA dont elle a dans un extrait de son livre communiqué au débat "Il était un piano noir..." révélé le thème sous-jacent s'agissant de l'inceste subi dans son enfance.
Ainsi que l'a déjà dit le juge des référés dans sa décision du 10 juillet 2014, les paroles de "l'aigle noir" ont été modifiées pour partie dans la chanson "le rat noir" pour intégrer un rat noir qui n'apparaît jamais dans la chanson de Barbara , mais le rythme des strophes est conservé ainsi que la mélodie.
Il existe donc une modification des paroles de la chanson, paroles dont A. dite Barbara est l'auteure.
Le choix du titre "le rat noir" vise la judéité de BARBARA et celle de son père et il convient de rappeler d'une part que le rat est la représentation habituelle de l'animal nuisible et par conséquent le symbole de ce qui doit être détruit.
Ce titre et cette image est utilisée à dessein par M. Dieudonné M'BALA M BALA pour dénaturer la chanson, assimilant le père de Barbara et Barbara elle-même à ces animaux, suggérant qu'ils sont nuisibles et reprenant d'ailleurs une représentation commune aux antisémites.
La chanson "l'aigle noir" par le texte de la chanson"le rat noir" est ainsi détournée de son sens et dénaturée.
Cette chanson est entrecoupée par les commentaires de M. Dieudonné M'BALA M BALA, évoquant perquisitions et cartes de police dans les commentaires et évoquant donc l'enfance de Barbara, enfant juive cachée pendant la guerre comme le rappellent d'autres chansons.
D'autres exemples des commentaires de M. Dieudonné M'BALA M'BALA sont les suivants :
-BARBARA est "cinglée" complètement "tarée".
-"Si si si j'ai l'information. Apparemment elle s'est fait "enculer" au bord d'un lac et elle a cru que c'était un aigle ou je sais pas quoi.. Bref c'était son père qui était venu tu sais et puis ben bon il l'a enculé quoi."
Ainsi il apparaît que les termes employés par M. Dieudonné M'BALA M'BALA sont volontairement grossiers et ce sans servir aucun objectif humoristique. Ils n'ont pour but que d'humilier A. dite Barbara, de la présenter non pas comme une victime mais comme participant à un acte sexuel vulgaire. Dire "elle s'est fait enculer" en parlant d'une enfant victime d'un inceste, c'est d'une part gommer son statut d'enfant et d'autre part insinuer une participation active à l'acte sexuel, niant l'agression subie.
Ce faisant, il ne peut s'agir des exceptions de parodie, pastiche et caricature prévues à l'article L 122-5 du code de la propriété mais de la seule volonté de salir une artiste reconnue en dénaturant son texte et en y ajoutant des commentaires nauséabonds.
Ces commentaires qui évoquent un épisode douloureux de l'histoire personnelle de BARBARA qu'elle a sublimé dans la chanson "l'aigle noir" constituent indubitablement une atteinte caractérisée au droit moral de l'auteur.
L'intention de M. Dieudonné M'BALA M'BALA tant dans la chanson que dans les commentaires n'est pas de rechercher un effet humoristique que l'on cherche vainement en écoutant la chanson ou en visionnant le clip mais manifeste une intention de nuire en transformant une chanson poignante sur l'inceste en une grivoiserie vulgaire et attentatoire au respect dû aux morts et à leur honneur.
Le bandeau défilant sur le clip-vidéo et écrit de la façon suivante " conformément aux lois ceci est une parodie de la chanson "l'aigle noir" de Barbara" est totalement inopérant et ne peut valoir exonération a priori pour M. Dieudonné M'BALA M'BALA de sa responsabilité.
Dans ces conditions, l'atteinte au droit moral de l'auteur sur l'oeuvre "l'aigle noir" par le clip vidéo dénommé " le rat noir" et la chanson "le rat noir" est constituée. 
Malgré l'ordonnance de référé ayant interdit à M. Dieudonné M'BALA M'BALA de continuer à diffuser ce clip vidéo sur son site ou à le faire cesser sur d'autres sites, il convient de constater que le clip a continué à être diffusé et que M. Dieudonné M'BALA M BALA à qui pourtant la décision a été signifiée dès le 15 juillet 2014, n'a pas fait cesser cette diffusion tant sur son site que sur les autres sites comme le montrent les procès-verbaux de constat des 22 juillet et 5 août dressés par Maître XXXXX huissier de justice
Sur les sites de M. Dieudonné M'BALA M'BALA, il est toujours possible d'acheter la chanson pour 90 cts ou 45 cts.
Il sera en conséquence alloué à Monsieur X, en sa qualité d'ayant droit de A. dite Barbara, la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte au droit moral de Monsieur X, en sa qualité d'ayant droit de A. dite Barbara.
Il sera fait droit aux demandes d'interdiction tel qu'il sera dit au dispositif.
Sur les autres demandes
Les conditions sont réunies pour allouer à M. X la somme de 5.000 euros, outre les frais des constats d'huissier dressé les 14 avril, 25 juin, 22 juillet et 5 août par Maître Z huissier de justice, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire, elle est nécessaire et sera ordonnée d'office conformément aux dispositions de l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par remise au greffe le jour du délibéré, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
Déclare Monsieur X recevable en ses demandes.
Dit que le clip-vidéo dénommé « Le rat noir » et la chanson « Le rat noir » constituent une violation du droit moral et sont à ce titre une contrefaçon de « L'aigle Noir ».

EN CONSÉQUENCE
Fait interdiction à Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA de reproduire, faire reproduire, représenter, faire représenter et d'une façon générale utiliser sous quelque forme et sur quelque support que ce soit la chanson « L'aigle noir » dont A. dite BARBARA est l'auteure (paroles et musique), et ce, sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard, passé le délai de quarante huit heures (48) suivant la signification du présent jugement, l'astreinte courant pendant un an.
Ordonne à Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA de cesser et faire cesser immédiatement la diffusion sur internet du clip-vidéo et de la chanson « Le rat noir », sous cette dénomination où toute autre dénomination et sous toutes ses formes et ce, sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard, passé le délai de quarante huit heures (48) suivant la signification du présent jugement, l'astreinte courant pendant un an.
Se réserve la liquidation de l'astreinte conformément aux dispositions de l'article L131-3 du code des procédures civiles d'exécution.
Condamne Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA à payer à Monsieur X la somme de 50.000 euros à titre de dommages intérêts.
Condamne Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA à payer à Monsieur X la somme de 5.000 €, outre les frais des constats d'huissier dressé les 14 avril, 25 juin, 22 juillet et 5 août par Maître BBBBB huissier de justice, par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.
Condamne Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA aux entiers dépens de la procédure qui pourront être recouvrés par B, avocate au barreau de Paris, par application de l'article 699 du code de procédure civile ».
Ce jugement est définitif."

mercredi 25 mars 2015

Justice aveugle


L'expression " Justice Aveugle" est empreinte d'une connotation péjorative. 
Ce caractère doit être, à mon sens, atténué, en tous les cas, amoindri,en ces temps de révolution technologique.
En fait, la justice aveugle a du bon aujourd'hui. Aveugle, parce qu'elle ne voit pas le prévenu. 
Cour d'Appel. Visio-conférence. Deux dossiers en visio conférence, deux demandes de mise en liberté. 
Techniquement, tout est en place. 
Commence l'audience en visio-conférence. Madame le Président constate qu'elle ne voit pas le détenu mais l'entend. Le détenu, lui, voit la Cour et l'entend. Le surveillant voit et entend la Cour. Une absence de réciprocité ou comme on aime à dire pas de parallélisme des formes ...
Madame le Président est agréable, et professionnelle. Elle sait gérer les incidents, les difficultés de toute nature. Agréable, professionnelle et pragmatique. Aucun énervement. Madame le Président demande au détenu s'il accepte de voir examiner sa demande sans que la Cour ne le voit. La Présidente précise que dans ce cas, on fera acter son accord et qu'on examinera sa requête. La Cour l'a déjà fait du fait de crises de cécité déjà rencontrées dans le passé et dans un passé récent. Il y a quelques jours ? 
La solution proposée par la Présidente de cette Cour ne me pose pas de difficultés; L'audience a lieu et devant un public et les avocats présents. 
Corps présent, bonne justice ? 
Pourquoi cette solution serait ellle la solution logique et attendue ? 
Ici, dans cet incident de visio conférence gérée avec élégance par cette Présidente, c'est un demi corps présent et pour une fois, c'est le détenu qui peut observer la Cour et non pas la Cour observer le détenu; 
Mais, sur le cas cité, en qualité d'observateur, je n'ai pas de critiques à formuler. 
Corps présent; Corps absent. Mi présent, mi absent. 
A partir de cette réflexion, il faut attirer l'attention sur l'intérêt de la représentation en matière pénale. Le prévenu présent, le prévenu représenté, c'est une option à déterminer et qui n'est pas sans incidence. 
Justice aveugle quand la technique vacille. 
Justice aveugle quand la représentation en justice est gérée. 
Peut être pas. Peut être plus d'intérêt porté au dossier qu'aux paroles maladroites du comparant. 
L'absent du prétoire n'est pas nécessairement celui qui a tort. 
La dématérialisation des corps. 
L'essentiel est que la justice puisse être visible et vue. 
De la justice aveugle à la justice sous les yeux d'autrui. 

Emmanuel GONZALEZ 

Représentation


Devant la Juridiction de Proximité, le Tribunal de Police, le Tribunal Correctionnel ou la Cour d’Appel ; l’Avocat assiste, en principe, le prévenu. La personne poursuivie est comparante. Elle est physiquement présente. Le jugement est contradictoire.
Traditionnellement, l’Avocat est aux côtés de son Client.
En matière pénale, l’Avocat assiste le prévenu. C’est la pratique courante dans une procédure, par essence, orale. Oralité et comparution semblent aller ensemble.
Devant les mêmes juridictions, l’Avocat peut représenter son Client. Devant la juridiction de Proximité et devant le Tribunal de Police, la démarche est habituelle. Devant la juridiction correctionnelle, la pratique est moindre.
 Pourtant, la représentation en matière pénale présente maints avantages, d’un point de vue de la défense et également des intérêts pratiques ; la personne convoquée étant éloignée du tribunal, en déplacement professionnel etc.
La Cour Européenne des Droits de l’Homme par arrêt en date du 23 mai 2000 a posé le principe de la représentation en justice et de l’effectivité de la défense.  
« Le droit à tout accusé à être effectivement défendu par un avocat figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable.
 Un accusé n’en perd pas le bénéfice du seul fait de son absence aux débats. L’avocat peut assurer la défense de l’absent en justice.
Même, si le législateur doit pouvoir décourager les abstentions injustifiées, il ne peut les sanctionner en dérogeant au droit à l’assistance d’un défenseur. Les exigences légitimes de la présence des accusés aux débats peuvent être assurées par d’autres moyens que la perte du droit à la défense »
Les absents n’ont pas toujours torts.
La Cour de cassation suivra la position de la CEDH. Comme suit :
 « le droit au procès équitable et le droit de tout accusé à l’assistance d’un défenseur s’opposent à ce que la juridiction juge un prévenu non comparant et non excusé sans entendre l’avocat présent à l’audience pour assurer sa défense ». .
Interviendront les articles 410, 411 et 412 du Code de procédure pénale issus de la loi du 9 mars 2004.
Il n’est pas inutile de les lire avec attention :

L’article 410 dispose

Le prévenu régulièrement cité à personne doit comparaître, à moins qu'il ne fournisse une excuse reconnue valable par la juridiction devant laquelle il est appelé. Le prévenu a la même obligation lorsqu'il est établi que, bien que n'ayant pas été cité à personne, il a eu connaissance de la citation régulière le concernant dans les cas prévus par les articles 557,558 et 560.
Si ces conditions sont remplies, le prévenu non comparant et non excusé est jugé par jugement contradictoire à signifier, sauf s'il est fait application des dispositions de l'article 411.
Si un avocat se présente pour assurer la défense du prévenu, il doit être entendu s'il en fait la demande, même hors le cas prévu par l'article 411.

L’article 410-1 prévoit

Lorsque le prévenu cité dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article 410 ne comparaît pas et que la peine qu'il encourt est égale ou supérieure à deux années d'emprisonnement, le tribunal peut ordonner le renvoi de l'affaire et, par décision spéciale et motivée, décerner mandat d'amener ou mandat d'arrêt.
Si le prévenu est arrêté à la suite du mandat d'amener ou d'arrêt, il est fait application des dispositions de l'article 135-2. Toutefois, dans le cas où la personne est placée en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention, elle doit comparaître dans les meilleurs délais, et au plus tard dans le délai d'un mois, devant le tribunal correctionnel, faute de quoi elle est mise en liberté.

L’article 411 ajoute

Quelle que soit la peine encourue, le prévenu peut, par lettre adressée au président du tribunal et qui sera jointe au dossier de la procédure, demander à être jugé en son absence en étant représenté au cours de l'audience par son avocat ou par un avocat commis d'office. Ces dispositions sont applicables quelles que soient les conditions dans lesquelles le prévenu a été cité.
L'avocat du prévenu, qui peut intervenir au cours des débats, est entendu dans sa plaidoirie et le prévenu est alors jugé contradictoirement.
Si le tribunal estime nécessaire la comparution personnelle du prévenu, il peut renvoyer l'affaire à une audience ultérieure en ordonnant cette comparution. Le procureur de la République procède alors à une nouvelle citation du prévenu.
Le prévenu qui ne répondrait pas à cette nouvelle citation peut être jugé contradictoirement si son avocat est présent et entendu. Le tribunal peut également, le cas échéant, après avoir entendu les observations de l'avocat, renvoyer à nouveau l'affaire en faisant application des dispositions de l'article 410-1.
Lorsque l'avocat du prévenu qui a demandé à ce qu'il soit fait application des dispositions du présent article n'est pas présent au cours de l'audience, le prévenu est, sauf renvoi de l'affaire, jugé par jugement contradictoire à signifier.

L’article 412 poursuit
Si la citation n'a pas été délivrée à la personne du prévenu, et s'il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de la citation, la décision, au cas de non-comparution du prévenu, est rendue par défaut, sauf s'il est fait application des dispositions de l'article 411.
Dans tous les cas, si un avocat se présente pour assurer la défense du prévenu, il doit être entendu s'il en fait la demande. Le jugement est alors contradictoire à signifier, sauf s'il a été fait application de l'article 411.
Dans tous les cas, le tribunal peut, s'il l'estime nécessaire, renvoyer l'affaire à une audience ultérieure, en faisant le cas échéant application des dispositions de l'article 410-1.
Le prévenu cité à personne, ou dont il est établi qu'il a eu connaissance de la citation, doit se présenter, sauf excuse valable. Si un avocat se présente il doit être entendu s'il en fait la demande.
Le prévenu non cité à personne, ou dont il n'est établi qu'il a eu connaissance de la citation, peut être représenté par un avocat. Le jugement sera réputé contradictoire à signifier. 
Dans tous les cas, lorsqu'un avocat se présente et en fait la demande, il doit être entendu s'il en fait la demande.
L’article 411 du Code pénal pose le principe de l’exigence d’un mandat écrit pour représenter le prévenu. Ainsi donc, si l'article 411 exige un mandat écrit de représentation, la juridiction ne peut refuser d'entendre l'avocat qui se présente, même sans mandat  écrit.
Des conclusions déposées par l’Avocat valent mandat écrit.
Ce qu’il faut retenir de ces réflexions sur la procédure pénale en matière d’assistance et de représentation en justice est qu’il faut, au cas par cas, réfléchir à l’opportunité de la représentation en justice en matière pénale. Au cas par cas, en fonction des éléments de la poursuite. En fonction de la personnalité de la personne poursuivie.
Des intérêts stratégiques peuvent exister.
Dans le cadre d’un dossier correctionnel ouvert sous la prévention de conduite en état alcoolique, muni d’un dossier préparé, la représentation est tout aussi efficace que l’assistance du prévenu.
En 2015, le Juge a intégré cette manière de se défendre en justice.
A vous de juger !


Emmanuel GONZALEZ